7 juin 2024

Actualités / Action

[Groupes de besoin] Des réunions obligatoires pour une réforme inique

Mai, période de reverdie, de floraison… et de convocations des Inspecteurs de lettres et de mathématiques pour « aider » à mettre en place la réforme Attal unanimement refusée par tous les acteurs de l’Education, notamment les groupes de besoins en 6e et 5e. Et la fête doit se poursuivre, avec deux demi-journées banalisées en juin, pour solde de toutes les heures de concertation nécessaires pour cette année et l’année prochaine.
Certains établissements ont boycotté. J’ai subi… Celle que j’ai éprouvée à la mi-mai s’est déroulée non dans le calme, mais dans la contestation… et n’a pas été de tout repos pour l’Inspectrice de Lettres, confrontée à un flot roulant d’expressions de détresse, de colère aussi, de refus unanime de cette réforme visant à trier aux élèves des classes les moins favorisées pour les envoyer, sans brevet vers l’apprentissage dès la fin de la troisième.
Ce refus s’est exprimé pour des raisons pratiques : impossibilité à l’appliquer par manque de professeurs, par surcroît de la charge de travail - avec un nombre de classes et de niveaux en augmentation, par perspective de la dégradation de la des emplois du temps, par incapacité à être professeur principal d’élèves inconnus ou à participer à tous les conseils de classe, et on en passe sur la notation, l’intervention des parents… Le refus est aussi idéologique : pourquoi permettre au privé de ne pas appliquer la réforme ? Et, pourquoi, au nom de la lutte contre les inégalités constatées, imposer à l’Education nationale de renforcer la ségrégation ? Nous ne trierons pas nos élèves !
A la demande : « Donnez-nous un seul argument défendant le bien fondé de cette réforme ! », l’Inspectrice n’a pas su, ou voulu, répondre ! Pourquoi alors nous préconiser les moyens de l’appliquer ?
Ce moyen ne repose que sur la concertation, non rémunérée : établissement de groupes travaillant en parallèle sur une progression commune, avec injonction à des évaluations communes, pour les groupes de niveaux différents.

Mais les moyens de refuser cette réforme existent. D’abord, l’organisation pédagogique de l’établissement ne repose que sur son conseil d’administration : il suffit d’y voter des groupes hétérogènes, puisque ce sont l’émulation et l’entraide, et non la stigmatisation, qui répondent aux réels besoins des élèves. Ensuite, la liberté pédagogique, actée par la loi, a force supérieure à celle d’un décret et d’une circulaire, issue de la volonté d’un seul et non validée, ni même examinée par la représentation nationale. Nul ne peut nous imposer de concertation non rémunérée, de progression ni d’évaluations communes.

Dans mon établissement, nos groupes seront hétérogènes, sans passage par la classe entière, et chacun suivra le programme choisi par chaque professeur, qui ne peut dispenser son enseignement de façon enthousiaste et enthousiasmante que sur ce qu’il apprécie et fait donc apprécier. C’est pourquoi nous avons quitté la grand-messe – houleuse – lorsqu’il s’est agi de commencer à organiser la mise en place de groupes « de besoins » dont nous ne voulons pas.
Nous ne trierons pas nos élèves !
Philippe Minot
S1 de collège à Reims